
5. Synthèses
Synthèse : Sido - Car j'aimais tant l'aube
Texte étudié
Étés réverbérés par le gravier jaune et chaud, étés traversant le jonc tressé de mes grands chapeaux, étés presque sans nuits… Car j’aimais tant l’aube, déjà, que ma mère me l’accordait en récompense. J’obtenais qu’elle m’éveillât à trois heures et demie, et je m’en allais, un panier vide à chaque bras, vers des terres maraîchères qui se réfugiaient dans le pli étroit de la rivière, vers les fraises, les cassis et les groseilles barbues.
À trois heures et demie, tout dormait dans un bleu originel, humide et confus, et quand je descendais le chemin de sable, le brouillard retenu par son poids baignait d’abord mes jambes, puis mon petit torse bien fait, atteignait mes lèvres, mes oreilles et mes narines plus sensibles que tout le reste de mon corps… J’allais seule, ce pays mal pensant était sans dangers. C’est sur ce chemin, c’est à cette heure que je prenais conscience de mon prix, d’un état de grâce indicible et de ma connivence avec le premier souffle accouru, le premier oiseau, le soleil encore ovale, déformé par son éclosion…(…)
Je revenais à la cloche de la première messe. Mais pas avant d’avoir mangé mon saoul, pas avant d’avoir, dans les bois, décrit un grand circuit de chien qui chasse seul, et goûté l’eau de deux sources perdues, que je révérais. L’une se haussait hors de la terre par une convulsion cristalline, une sorte de sanglot, et traçait elle-même son lit sableux. Elle se décourageait aussitôt née et replongeait sous la terre. L’autre source, presque invisible, froissait l’herbe comme un serpent, s’étalait secrète au centre d’un pré où des narcisses, fleuris en ronde, attestaient seuls sa présence. La première avait goût de feuille de chêne, la seconde de fer et de tige de jacinthe… Rien qu’à parler d’elles je souhaite que leur saveur m’emplisse la bouche au moment de tout finir, et que j’emporte, avec moi, cette gorgée imaginaire…
Colette, Sido, (1929)
Introduction
Présentation de l'auteur, de l'œuvre et de l'extrait
En 1930, Colette publie Sido, recueil où elle évoque son enfance en Bourgogne, marquée par l’attachement à sa mère et à la nature.
Colette évoque ici un souvenir d’enfance lié à ses promenades matinales. Elle raconte ses départs à l’aube, ses explorations dans la nature et montre comment celle-ci l’a initiée et nourrie.
Analyse générale du passage
Ce petit complément ne sera pas à restituer à l’oral : il te permet juste de situer le passage et d’en comprendre les enjeux avant d’aller plus loin dans l’analyse.
Dans cet extrait tiré de Sido, Colette évoque un souvenir d’enfance lié à un matin d’été, où la nature devient le théâtre d’une expérience intime et fondatrice. Ce texte célèbre l’harmonie entre l’enfant et le monde naturel, dans une atmosphère empreinte de douceur et de lumière. À travers une écriture poétique et sensorielle, Colette traduit l’émerveillement de la découverte et la plénitude d’un moment suspendu.
La nature y est décrite comme un espace de liberté, un refuge bienveillant qui permet à la fillette de s’éveiller à elle-même. Le style associe la précision des sensations à la musicalité des phrases, mêlant lyrisme, sensualité et nostalgie. Ce souvenir devient ainsi une véritable célébration de la vie, où chaque élément — la brume, l’eau, les fruits, la lumière — participe à une communion totale entre l’humain et le monde.
À travers cette scène à la fois intime et universelle, Colette fait de la nature le lieu de la mémoire, du plaisir et de la connaissance de soi.
problématique
Comment Colette fait-elle de la nature un lieu d’émerveillement et de découverte de soi ?
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